

Rencontre avec les créateurs de Cortex, l'appli qui veut booster vos performances de jeu
2019 M04 30
Julien et Cécile sont les créateurs de Cortex, une application développée pour mesurer et améliorer vos performances in-game. Rencontre avec deux passionnés de gaming et d’esport qui rêvent d’aider les joueurs à se surpasser.
Avec l’explosion de l’esport, les start-ups qui travaillent sur l’exploitation des données de jeu sont en plein essor. En France, on a notamment la chance de compter PandaScore, qui fournit des stats sur les joueurs pros des plus gros jeux, et qui est en pleine expansion. Mais il existe aussi des projets plus jeunes comme Cortex, un logiciel qui permet aux joueurs PC (pros comme amateurs) de mesurer en temps réel leur performances de jeu.
Pour connaître l’origine de ce projet précurseur et comprendre le fonctionnement de Cortex, on a rencontré le duo qui en est à l’origine, et qui travaille sur son temps libre sur ce logiciel gratuit (qui le restera), et qui vient d’entrer en phase de bêta.

D'où est venue l'idée de créer Cortex ?
Julien : À un moment dans notre carrière, on a tous les deux eu l’occasion de bosser régulièrement sur des sujets esport, et un jour Cécile m’a dit : « mon frère qui est joueur pro (NiCOgdh, DPS de Paris Eternal, NDLR) sur Overwatch me dit que ce serait vraiment sympa de savoir combien de kilomètres on fait avec une souris. On passe douze heures par jour devant notre PC, à mon avis les chiffres sont vertigineux. » Donc elle me parle de cette idée, je lui dis pourquoi pas, et je suis revenu la voir deux jours après avec un prototype. Quand on bougeait la souris, on voyait un chiffre qui monte et le nombre de kilomètres et de pixels parcourus. C’est parti de cette anecdote-là.
Cécile : Oui c’est vraiment parti du besoin manifesté par mon frère d’avoir des données hardware hors-jeu pour pouvoir se comparer et se mesurer à ses potes.
Et le nom de l’application, il fait référence à quoi ?
Julien : Le nom fait référence à l'outil de jeu principal du joueur, son cerveau. C'est lui qui détermine en grande partie les performances que je joueur va développer, comme le lien entre la perception d'un stimulus visuel et la réaction musculaire qui suit. C'est aussi une private joke car le premier prototype ne s'intéressait qu'à l'utilisation de la souris, comme Minus et... Cortex.
Quel est votre rôle dans le développement de Cortex ?
Julien : Cécile est designer, elle s’occupe de créer les différentes pages et écrans de l’application. Elle a aussi défini toute la charte graphique au sein de l’application et autour. Et moi je suis développeur, donc je mets en code ce qu’elle propose et je m’occupe de tout ce qu’il y a autour de l’application, techniquement parlant, en termes d’hébergement, etc.
Cécile : On a des rôles vraiment complémentaires parce que Julien s’occupe de tout le côté technique et fonctionnel de l’application, et moi je m’occupe de la mise en image de l’interface et de l’identité du produit.
Comment ça fonctionne et quelles sont les données collectées par Cortex ?
Julien : Cortex, c’est une application que tu installes sur ton ordi et qui va enregistrer toutes les interactions entre le jeu et toi. Donc il va capturer ce qui se passe au niveau de ta souris, de ton clavier, mais aussi des choses auxquelles on pense moins comme ce qui rentre dans ton micro ou ce qui se passe au niveau de ton écran (quelles zones sont utilisées par exemple).
Bref, tout ce que la simple utilisation d’un PC peut nous offrir, on va le tracker en temps réel et restituer ces informations mises en forme dans des graphiques et des compteurs. Et après ta session de jeu, tu peux retrouver ces informations différemment pour connaître l’évolution de ton maniement de la souris et du clavier. tu pourras mettre en relief ces infos en fonction du type de jeu auquel tu joues.
On peut partager ses performances ?
Julien : Bien sûr ! On peut partager facilement ses sessions de jeu, et c’est même l’un des buts de l’application.

Comment les données récoltées permettent de s'améliorer concrètement sur un jeu ?
Cécile : Par exemple sur Overwatch, la précision au tir (aim) est assez dépendante de la vitesse de déplacement de la souris. Mais au-delà du fait que le tir doit être précis, la donnée de déplacement du point A au point B va permettre d’identifier plusieurs axes d’amélioration qui peuvent être hardware, comme « ma souris est mal réglée, j’ai mis trop de poids dedans ou pas assez, etc. » Et en complément, les réglages peuvent être optimisés. Typiquement, si on mesure cette donnée entre un joueur amateur et un joueur pro, on va voir une grosse différence et ça prouve bien que cette vitesse est très corrélée au skill d’un joueur.
Julien : Comme on est capables de te dire quelles touches tu utilises le plus et le moins, ça peut aussi être intéressant dans un MOBA pour savoir si tu ne te sers pas assez d’un sort par exemple, pour voir comment l’intégrer dans ton jeu.

Pour l’instant, il n’y a pas encore d’intégration avec les spécificités des jeux ?
Cécile : Non, il reste à faire tout un travail d’interprétation et de liaison de ces données en fonction du contexte de jeu. Tu ne vas pas identifier les mêmes axes d’amélioration sur un FPS, un MOBA ou un STR. Donc ça va être une surcouche à ajouter à moyen et long-terme, parce que la priorité est déjà de stabiliser l’outil. Après, ce sera à nous d’orienter l’utilisation de l’outil pour les performances et l’amélioration in-game.
Est-ce que vous aimeriez à l'avenir collecter des données physiologiques ?
Julien : On part vraiment de la base, qui est commune. Tout le monde a en commun les périphériques que j’ai cités et peut installer l’appli sans rien de plus. Il n’y a pas besoin de matériel supplémentaire pour faire de l’eye-tracking ou connaître ta pression sanguine ou ton pouls. Par contre, ce qui est intéressant, c’est que si on veut intégrer ces données à l’application, il nous suffit de la rendre compatible avec une Apple Watch par exemple. Pour nous, c’est plus évident et rapide de distribuer un logiciel.
Cécile : On n’est pas fermés à cette possibilité en tout cas.

Quid de la gestion des données collectées ?
Julien : Les données que l’on récolte sont totalement anonymisées parce qu’elles sont uniquement intéressantes pour le joueur.
Est-ce que Cortex a un impact sur la latence ?
Julien : Sur le ping non, après si tu joues sur un vieux PC, ça risque d’être un peu lent, mais c’est une application qui n'est pas trop gourmande. Après, il n’y a pas de ralentissement réseau, car le seul moment où l’application se connecte à internet, c’est quand tu fermes une session et qu’elle enregistre tes données dans le cloud pour plus tard.
Quels sont vos futurs projets pour l’application ?
Julien : Il y a un petit bonus sur lequel on se penche qui s’appellerait la "training zone" et qui se serait un petit module d’entraînement pur au sein de l’application. C’est quelque chose auquel on n'avait pas du tout pensé, et qui peut se rajouter parce qu’on a eu plein de demandes. Ça servirait un peu de démo fournie avec l’application, parce qu’on proposerait de tester la vitesse de réaction à des stimuli visuels, ou la vitesse de déplacement entre deux points chauds de l’écran sans avoir à lancer un jeu.
On prépare aussi une collaboration avec la Cité des Sciences cet été, avec leur e-LAB des jeux vidéo, qui s'intéresse beaucoup aux données biométriques des joueurs. La forme que ça prendra n'est pas encore définie, mais on se rapproche d'autres acteurs autour des sujets de data et de gaming.